Les propriétaires de La Pommeraie aux XVIIIème et XIXème siècles :
Les familles
Bernon, Duperré, Giraud, Grand d’Esnon, et Gorse
Au XVIIIème siècle la propriété dite « hôtel de la Pommeraye », appartint à des familles de négociants, les Bernon et les Liège.
Anne Bernon acheta en 1681 l’hôtel de la Pommeraie, "domaine relevant à foi et hommage lige de la châtellenie de La Grémenaudière, au devoir d'une paire d'éperons dorés à muance de seigneur et de vassal, avec une maison à tleu (c'est à dire ayant des cheminées) couverte de tuiles, composée de chambres basses et hautes, avec ses dépendances de treuil, cellier, écurie et autres bâtiments, cour, jardin, bois et autres dépendances; le tout renfermé de murailles, faisant face à l'occident au jardin, pré, bois et vignes du domaine de La Coudray, le chemin par lequel on va au château de Périgny entre les deux et jouxtant, au nord le chemin qui va de La Rochelle à Saint-Rogatien et enfin au sud, au jardin du château de Périgny", (on trouve par ailleurs un Pierre Bernon seigneur des Grolles en 1681) et Jacques Bernon, négociant, fils d’André Bernon et Françoise Mousnereau, Maître en la monnaie royale de La Rochelle, le vendit en 1743, moyennant 24 000 livres, à François Liège, négociant, époux de Marie-Anne-Suzanne Bernon, la propriété revint à leurs enfants, Marie-Anne-Suzanne et Sarra Liège. Cette dernière étant morte en 1766 le logis resta à Marie-Anne-Suzanne, épouse d’Aimé Benjamin Fleuriau (né le 24 juillet 1709, mort le 3 juillet 1787). C’était aussi la mère de Marie-Adélaïde Fleuriau (née le 22 mai 1766, morte le 3 avril 1833) qui possédait avec son époux Pierre-Pandin de Rommefort (né en 1742 et mort le 11 novembre 1823), la propriété contiguë à La Pommeraie, le château de Coureilles. Marie Adélaïde et ses frères en héritèrent et vendirent la Pommeraie le 18 octobre 1807 à Benjamin Tostee, Officier de Santé.
Au XIXème siècle, après les négociants, les notables :
Ce n’est qu’en mars 1838 que Marc-Antoine-Marguerite-Félix Giraud et son épouse Nancy née Casimir achetèrent la Pommeraie au directeur de l’enregistrement des domaines de la Charente Inférieure, Henri-Anne Hobocq et à son épouse, Louise Joséphine Anne Alexandrine, née Ancelin de la Garde. Les Hobocq possédaient en effet la propriété depuis 1829 et l’avaient achetée à un ancien magistrat, Ferdinand Dénéchaux, qui l’avait lui-même acquise sur adjudication judiciaire en 1823 après que Benjamin Tostee l’eut vendue à un acquéreur insolvable.
Marc-Antoine-Marguerite-Félix Giraud était le fils d’Agathe Soulange Duperré, née le 21 août 1757 à Versailles et qui eut entre autres pour frères (la famille compta 22 enfants) :
- Victor-Guy Duperré (né le 20 février 1775- mort le 2 novembre 1846 à Mon Repos). qui fut nommé amiral et pair du royaume en 1830 pour sa participation à l’expédition d’Alger, après avoir été fait grand officier de la légion d’honneur en 1820. Il fut aussi ministre de la marine et des colonies en 1834 et en 1839. Sa statue, à La Rochelle, sur le quai qui porte son nom, tourne pourtant le dos à la mer.
- Charles-Louis Duperré (né à Versailles, 2 mars 1753), fut capitaine de gendarmerie à Saint-Malo.
- Louis-Valéry Duperré (né à La Rochelle, 14 décembre 1765-mort à Nieul-sur-Mer le 29 octobre 1820).
Elle avait aussi pour sœurs :
- Marie-Soulange Duperré (née à La Rochelle le 15 août 1759- morte à Paris le 6 avril 1832), mariée à Pierre-Ambroise-François Choderlos de Laclos (auteur des « Liaisons dangereuses ») le 3 mai 1786, deux ans après la naissance à Mortagne le 3 mai 1784 (Marie-Soulange avait quatorze ans), d’un fils, Étienne Fargeau qu’ils cachèrent d’abord à Thairé-d’Aunis avant de le reconnaître.
- Marie-Henriette-Furcy Duperré (née à La Rochelle le 4 Janvier 1762, décédée après 1800), mariée à Louis-Martin de Carrey d’Asnières, conseiller à Rouen.
Agathe-Soulange Duperré se maria le 4 novembre 1778 à La Rochelle, à Marc-Antoine-Marguerite-Alexis Giraud (né à Choupeau, Saint-Jean-de Liversay, 30 septembre 1748, mort à Paris, 8 ou 20 août 1821) qui avait été reçu avocat au Parlement de Paris le 21 août 1775, et devint successivement Procureur du roi de la sénéchaussée d’Aunis, sénéchal de la Châtellenie de La Jarne en 1788 et en 1789, sénéchal de la seigneurie de Landrais.
Élu juge de paix à La Rochelle en 1790, il fut aussi élu le 7 septembre 1792 membre de la Convention. Il se prononça pour la détention de Louis XVI et se montra adversaire des Jacobins.
En Février 1795, il fut désigné avec Bourdon de l’Oise et Vardon pour se rendre à Saint-Domingue en qualité de commissaire, mais ni lui ni ses collègues ne partirent. Réélu le 21 Vendémiaire an IV (13 Octobre 1795) Député au conseil des Cinq Cents, il donna sa démission le 4 Floréal an IV (23 avril 1796). Le même mois, il se rendit à Saint-Domingue avec Léger-Félicité Sonthonax, Raymond et Leblanc. Arrivés dans l’île le 12 mai 1796, leur mission était de mettre fin au « préjugé de couleur ». Car après l’abolition de l’esclavage du 4 février 1794, il s’agissait en fait « de remettre les nouveaux libres au travail » ! En 1799, son administration fut l'objet des attaques les plus vives et Vincent-Marie de Vaublanc l’accusa de forfaiture et de dilapidation. Son rappel en France fut ordonné. Lorsque Giraud se présenta devant le Conseil, Tarbé et Vaublanc lui-même implorèrent en sa faveur l'indulgence de l'Assemblée : on fit remarquer qu'il avait fait un rapport important au Directoire, qui avait négligé de le communiquer; on représenta Giraud comme ayant été égaré par Sonthonax, et le député de la Charente-Inférieure ne fut pas inquiété. (Dictionnaire des Parlementaires français).
En 1798, il fut nommé consul de France à Boston.
Il démissionna en 1815 et se retira dans le Kentucky, dans un cottage qu’il avait nommé « New Choupeau », en souvenir du lieu de sa naissance. Il mourut en 1821 lors d’un voyage à Paris.
Agathe-Soulange hérita de son oncle, Monsieur de Beaumont plusieurs fermes importantes composant le château et la terre de Rocquemont, en Normandie, assurant ainsi une partie de la fortune des Giraud.
À La Rochelle, Agathe-Soulange et Félix Giraud habitaient au 18 rue de l’Escale.
Leur fils, Marc-Antoine-Marguerite-Félix Giraud (né à La Rochelle, 27 novembre 1780, mort à La Rochelle le 13 février 1841) épousa Suzanne-Estelle Parat (née vers 1780, décédée à La Rochelle le 2 mars 1814) puis en 1815, Nancy Casimir (née en 1793, décédée à La Rochelle en 1865), fille d’un médecin militaire né à Saint-Maixent, patriote en 1789 puis mis à l’index en 1793 pour avoir été opposé à la mort du roi.
C’est eux qui achetèrent La Pommeraie en mars 1838, juste avant le mariage de leur fille Élisa.
Marc-Antoine-Marguerite-Félix Giraud et Nancy Casimir eurent 3 enfants :
- Marc-Antoine Louis-Félix Giraud qui épousa Louise-Claire-Philippe Teulon, la meilleure amie d’Élisa Giraud. Il devint un célèbre ophtalmologiste.
- Anne-Élisa Giraud (1819), qui épousa le 29 novembre 1838 Charles Fournier (né à Beaugency, Loiret, en novembre 1810-mort à La Rochelle, 1er février 1889), ancien élève de l’école Polytechnique et officier d’artillerie, il obtint sa licence en droit à Paris en 1867 et après avoir exercé les fonctions de clerc de notaire à Paris, devint notaire en achetant à La Rochelle l’étude de maître Landriau, fut président de la chambre des notaires de l’arrondissement de La Rochelle.
Conseiller municipal de La Rochelle depuis août 1852 il devint adjoint au maire puis il fut nommé maire de La Rochelle par décret impérial le 14 Octobre 1867. Il s’attacha d’abord à l’amélioration du service de l’eau. Le système de l’ingénieur Potel fut adopté. Il s’agissait de concentrer les eaux des sources de Lafond au Champ de Mars, de les aspirer avec des pompes mues par des machines à vapeur et d’établir un château d’eau (rue de Bel Air), puis de les distribuer à quarante bornes fontaines établies en ville. Le but était de fournir cent litres d’eau par habitant et par an. La distribution de l’eau selon ce système fut mise en service le 15 avril 1865. C’est lui aussi qui inaugura le 17 Octobre 1769 la statue de l’amiral Duperré (le grand oncle de sa femme) et décida de son emplacement (quai Duperré) et de la composition des bas-reliefs ornant son socle sur lesquels il fit figurer des membres de sa famille.
Élu député conservateur impérialiste le 20 février 1876, il siégea dans le groupe de l’Appel au peuple (groupe parlementaire créé en 1872 et qui réunissait les députés bonapartistes) et vota avec la minorité de droite. Il soutint Mac-Mahon et fut réélu le 14 octobre 1877, mais les opérations électorales furent annulées et, obligé de se représenter, il fut finalement battu par un Républicain, le juge Barbedette. Il fut aussi vice-président du Conseil général et chevalier de la Légion d’Honneur.
Anne-Élisa Fournier, née Giraud, avait suivi l’enseignement du pasteur Athanase-Charles Coquerel, membre du Consistoire.
Athanase-Charles Coquerel
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(Caricature de Cham)
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Georges Sand l’appelait « la charmante huguenote ». Elle était décrite ainsi par son mari dans ses mémoires : « Des cheveux noirs, lisses et fins, des yeux bleus surmontés de sourcils bien dessinés ; le nez bien fait, les narines un peu ouvertes, un visage doux, une tête petite sur des épaules blanches et potelées, les bras arrondis et gracieux, les doigts effilés […] la jambe fine, le pied à tenir dans la main […] Et tous ces trésors animés par le plus doux esprit ! Ce n’est rien encore. La voix juste et sympathique, le regard modeste et toujours franc, la tenue simple, le tact délicat […] L’oreille fine, de la gaieté. On doit être fier d’une telle femme ; je le suis ; mais elle, à peine y croit-elle à ces perfections… » (Texte cité par Arlette Lafuste, Un témoin privilégié de la vie rochelaise au XIXème siècle, Charles Fournier, (1810-1889), notaire et maire de La Rochelle , édition Rumeur des Âges, Le Poiré sur Vie, 1996).
Le couple s’installa après son mariage, 20 rue Bazoges à La Rochelle. La Pommeraie n’était pour eux qu’une maison de vacances où Élisa ses enfants et sa sœur Marie Gabrielle faisaient de fréquents séjours tandis que sa mère Nancy Casimir Giraud s’y occupait à vendanger ou à chercher des escargots. (Arlette Lafuste, ouvrage cité).
Maurice Sand
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Parmi ses amis, le couple était intime avec les Duvernet, de La Châtre. Ceux-ci leur firent faire la connaissance de la baronne Dudevant, alias George Sand, qui les reçut à Nohant en 1844. Élisa y revint plusieurs fois avec ses enfants et participa aux soirées théatrales de George Sand laquelle lui marquait beaucoup d’amitié. À la faveur d’une de ces réceptions, elle eut le privilège d’entendre Chopin qui joua toute une soirée et elle n’hésita pas à chanter avec son accompagnement. En août 1875, Elle fit visiter La Rochelle et ses environs à Maurice, le fils de George Sand.
Elle eut deux enfants : Albert en 1839 et Marie en 1841.
- Marie Gabrielle Giraud (1821-1875) épousa Charles Chaudreau (né le 14 novembre 1814 à Saint-Maixent- mort le 14 Octobre 1879 à La Rochelle) en 1840. Charles Chaudreau fut Président du Tribunal Civil de La Rochelle à partir de novembre 1868 puis Procureur de la République à La Rochelle. Il était grand amateur de musique et de littérature et se montrait dans les salons rochelais.
Ils eurent 5 enfants dont 2 moururent en bas âge :
- Louise Chaudreau (1841-1864), mariée en 1862 à Hilaire-Édouard Tallandier (1823-1891)
- Alice Chaudreau (1843-1932), mariée en 1867 à Hilaire-Édouard Tallandier (1823-1891)
- Gabrielle Chaudreau (1844-1845)
- Charles Chaudreau (1846-1911)
- Marguerite Chaudreau (1848-1849)
Alice Chaudreau et Hilaire-Édouard Tallandier eurent une fille, Henriette-Gabrielle-Louise Tallandier (1868-1905), mariée le 5 août 1889 à Albert-Gonzalez-Henri Grand d’Esnon (né le 23 juin 1855 à Montpellier, mort le 10 juillet 1905 à Saint-Étienne, enterré à La Rochelle).
- Le couple eut des enfants : Jules-Édouard-René Grand d’Esnon (1840-1892) et Alice-Charlotte-Marie Grand d’Esnon (née le 11 janvier 1892 à Paris-morte le 18 mars 1940 à Périgny) dont un oncle, Charles Antoine Henri Grand d’Esnon, baron et général, mourut en 1914 pendant la Grande Guerre. Elle se maria le 11 juillet 1916 à Georges-Joseph-Léon Gorse (né le 16 mars 1889 à Toulouse, mort le 10 Avril 1964 à Compiègne, mais inhumé à Périgny) qui hérita ainsi du domaine de La Pommeraie et assura sa transmission à la famille Gorse.