Petite histoire de Châtelaillon (Birrier)

Résumé de « Petite histoire de Châtelaillon », d’Éric Birrier

Géographie

« Le site se décompose en trois parties bien distinctes (…). Le promontoire, le littoral sableux et l’arrière pays marécageux. (…) Le promontoire, vestige d’un îlot calcaire marneux, s’étirait, il y a 2000 ans, d’est en ouest du lieu dit « Angouste » au plateau rocheux situé à plus de deux kilomètres vers l’ouest (mais à 250m selon d’autres). (…)  Au nord et au sud, les marais sont formés d’alluvions marines, séparés de l’estran par un cordon littoral de galets et de sables. Ce cordon littoral apparut au Moyen-Âge. » (Petite histoire de Châtelaillon, Eric Birrier, Rupella, 1996).

Préhistoire

Seuls signes d’occupation préhistorique, des silex à patine blanc ivoire furent découverts au XIXème siècle par Georges Musset à l’est des Boucholeurs. On découvrit aussi des pointes de flèches et des éclats de silex.

Antiquité

Si l’archéologie semble attester une occupation du site à l’époque gallo-romaine, les plus anciens objets découverts (tuiles, agrafes, sépultures) ne sont pas antérieurs à  la fin du Vème siècle de notre ère.

Moyen-Âge

On a aussi retrouvé une vaste nécropole mérovingienne « constituée de dizaines de sarcophages et contenant du mobilier en bronze et en métal » (Le patrimoine des communes de la Charente-Maritime) datant du VIIème siècle.

Le premier site de culte christianisé d’Aunis semble avoir été, au IXème siècle, celui du  prieuré Saint-Romard, situé à Châtelaillon.

À la charnière des Xème-XIème siècles, les limites de la viguerie de Châtelaillon (la viguerie était une juridiction administrative tenant son nom de celui du lieu où elle était rendue, le vicus, c'est-à-dire le bourg, d'une certaine importance, sans être obligatoirement pour autant un chef-lieu de cité. Apparue à l'époque carolingienne, la viguerie était au départ le siège d'une juridiction civile et criminelle rendue au nom du comte ou du vicomte. Cependant, avec le déclin du pouvoir local et l'accroissement du pouvoir des juridictions royales, la viguerie devint la juridiction la plus petite, ne connaissant plus de la haute justice pour ne s'occuper que des affaires courantes. Elle était administrée par un viguier, c'est-à-dire un juge dont les compétences variaient, selon les régions et les époques, du juge de cour d'assises à celui de juge de paix rural.) atteignaient la Sèvre au nord et la Charente au sud. Les îles, sauf Oléron, en dépendaient.

La dislocation du pouvoir carolingien, à la fin du Xème siècle, autorisa l’émergence  de véritables dynasties locales. Ce fut le cas à Châtelaillon où une famille s’implanta, les Allio ou Allion, alternant les prénoms Eble et Isembert.

En 969 déjà, un Isembert (Isembert Ier ?) avait fait des dons à l’abbaye de Saint-Cyprien.

Le premier Eble (Eble Ier ?) apparut vers 1004 dans le testament de la comtesse de Poitiers avec la signature « Aloiensi Ebalo ». Il mit la main sur les possessions du prieuré Saint-Romuald.

En 1047 le seigneur de Châtelaillon signait « Eblonis de Castello Allonis ».  Sa richesse provenait essentiellement du commerce du sel.

En 1049, le seigneur était Isembert (Isembert II ?) qui eut, avec sa femme Clarice, au moins un fils, Eble et une fille, Arengarde, qu’il maria au comte d'Anjou Foulque Réchin en 1087. Pour répudier sa femme Clarice et se remarier avec une nommée Gisberge, il dut acheter la bienveillance des prêtres par quelques donations.

Eble II lui succéda. Il continua la politique paternelle de dons au clergé pour s’en assurer le soutien. Il échangea sa loyauté à Guillaume d’Aquitaine contre l’abbaye de Saint-Georges, c’est à dire la possession de l’île d’Oléron. Il se brouilla néanmoins avec les clercs et fut 5 fois excommunié par le pape.

Isembert (Isembert III ?) succéda à Eble II vers 1100. Il possédait, outre la forteresse de Châtelaillon, les châteaux de Voutron au sud et de l’Ileau au nord. Pour redorer son image auprès du clergé, Il abandonna les droits et coutumes relatifs aux marais salants d’Yves, Aytré, Voutron et Angoulins aux moines de Saint-Jean-d’Angély et favorisa l’église de Saint-Vivien.

Le site de Châtelaillon, qui aurait été fortifié à l’origine sur l’ordre de Charlemagne, (selon Arcère) était devenu, au douzième siècle, la ville la plus importante d’Aunis, défendue par des remparts et plusieurs tours.

Mais en 1130, le nouveau duc d’Aquitaine, Guillaume X (futur père d’Aliénor d’Aquitaine) prit les armes contre ce seigneur devenu trop riche grâce aux commerces du sel et du vin et trop puissant militairement.

Châtelaillon semblait imprenable mais était privée d’eau potable. Le seul puits utilisable se trouvait à l’extérieur de la forteresse. Un blocus fut mis en place, tant terrestre que naval. Isembert abandonna alors les assiégés et se réfugia au donjon de l’Ileau, qui était isolé au milieu des marais. Il résista là une année entière mais dut finir par négocier. Il recouvra sa liberté mais perdit une partie de ses biens, conservant cependant l’île de Ré.

Guillaume fit raser le donjon de l’Ileau mais conserva la forteresse de Châtelaillon et mit la main sur l’Aunis et ses ports. Ce fut le début de la décadence de la cité, la relève étant prise alors par le port neuf de La Rochelle.

La châtellenie de Châtelaillon passa ensuite aux mains de parents des Allio, les Mauléon puis des Parthenay-Larchevêque.

Jean l’Archevêque, en 1401, en fit hommage à Charles VI. Ce seigneur, sous le règne du même roi, vendit Châtelaillon à Charles, Dauphin & comte de Poitou, lequel en disposa en faveur d’Artus, comte de Richemont, connétable de France. Celui-ci devenu Duc de Bretagne, remit Châtelaillon au Roi, et Charles VII en fit don avec une clause de réversion à Jean, comte de Dunois, chef de la Maison de Longueville.

Le Comte de Dunois étant entré dans la ligue du bien public, fut dépouillé de ses biens par Louis XI,  lequel en donna la jouissance à Charles d’Anjou, Comte du Maine, son oncle. Mais en 1465, le Roi pardonna aux coupables et remit le comte de Dunois en possession de la terre de Châtelaillon.

En 1541 le 20 mars, Philippe Chabot, chevalier de l’ordre du roi, amiral de France, comte de Bezancois et de Charny, acheta la baronnie de Châtelaillon et la seigneurie de Salles, de François d’Orléans Rothelin.

 img-3.jpg

Carte tirée de la « Petite histoire de Châtelaillon », Eric Birrier, Rupella, 1996

Temps modernes

La période fut marquée par de nombreux tremblements de terre (une trentaine connus entre1427 et 1780) et des tempêtes qui achevèrent la destruction du château et de la cité de Châtelaillon. Les marais furent asséchés aux XVIIème et XVIIIème siècles (à partir de 1639). Digues et écluses furent construites. Les exploitations confiées à des métayers furent appelées « cabanes ».

Quant à la baronnie de Châtelaillon qui était revenue on ne sait comment dans la Maison de Longueville, elle fut vendue en 1596 par Marie de Bourbon, duchesse de Longueville et d’Estouteville, à Antoine Courault, Procureur du Roi au Présidial de la Rochelle.

Après la mort de Courault, Châtelaillon fut saisi réellement sur ses héritiers, et vendu le 31 Août 1615. Daniel Green de S. Marsault, qui commandait en 1622 les troupes de la Rochelle lors du siège de la ville, acquit alors la baronnie par décret :

Jean-Louis Charles d’Orléans de Longueville, dernier mâle de cette Maison, étant décédé le 4 Février 1694, le Fermier du Domaine demanda la réunion de Châtelaillon à la Couronne. La réunion fut ordonnée le 9 mars de la même année ; mais les enfants de Pharamond Green de Saint-Marsault, chevalier, seigneur de Châtelaillon, (premier Saint-Marsault à se convertir au catholicisme devant la menace constituée par les dragons du roi qui occupaient Salles) ayant supplié le roi d’agréer un échange, celui-ci accepta la seigneurie de Dompierre près de la Rochelle, et le contrat fut passé le 5 février 1699.

L’église Saint-Jean l’Évangéliste menaçant ruine, le comte Louis-Alexandre de Saint-Marsault la fit démolir en 1783 et tenta d’établir un nouveau village au lieu-dit « Les Trois Canons ».

Henri-Charles Benjamin Green-de-Saint-Marsault devint marquis de Châtelaillon en 1780. Grand sénéchal de La Rochelle et du pays d’Aunis, il présida l’assemblée générale des Trois États de la sénéchaussée en 1788.

Époque contemporaine

Le marquis, dont deux fils avaient émigré pour faire le coup de feu avec les Allemands contre la Révolution, fut arrêté en 1793 et libéré en 1794. Il dut racheter son château du Roullet à Salles où il mourut en décembre 1819.

La municipalité de Châtelaillon, instituée en 1789 eut pour premier maire Chauveaux, mais la paroisse ne possédant plus d’église fut réunie pour le culte à Angoulins en 1801. La population n’était plus que 150 habitants environ. Personne ne voulant être maire, le préfet désigna le maire d’Angoulins, Me Berigaud pour gérer les deux communes. Puis en 1823, Châtelaillon fut finalement rattachée à Angoulins. Les Trois Canons passaient à Yves.

Un nouveau village émergeait pourtant, s’adonnant à la mytiliculture, celui des Boucholeurs.

Ce furent l’apparition de la mode des bains de mer et la construction de la ligne de chemin de fer qui ressuscitèrent la commune.

La compagnie des chemins de fer des Charentes acheta en 1877 25 hectares de terrains littoraux au nord de la ville à la famille Green de Saint-Marsault. Une halte fut établie et des parcelles loties. En 1882 débuta une seconde phase sous l’impulsion d’un avocat spéculateur de Barbezieux, Gabriel Fauconnier qui fit lotir 80 lots de 300m2 séparés par un boulevard, bâtir une chapelle et des halles couvertes. Alcide d’Orbigny, qui possédait une villa, prit la tête d’un groupe de pression qui obtint d’Angoulins la construction d’une école, d’un bureau de poste, d’une nouvelle gare et, en 1893, d’un casino.

La commune fut rétablie en 1896 sous l’impulsion de l’historien Georges Musset qui fut élu maire.

Elle connut une expansion très rapide : 412 habitants en 1892, 814 en 1901, 1183 en 1911, 2236 en 1936, 5000 en 1955.

Occupée pendant la seconde guerre mondiale à partir du 23 juin 1940, Châtelaillon fut fortifié par la construction de blockhaus, la plage recouverte de chevaux de frise, un camp retranché étant aussi installé près de la gare. À la Libération, la ville se trouva incluse dans la poche de La Rochelle et ne fut donc libérée que le 6 mai 1945, après la capitulation de l’amiral Dœnitz.

Châtelaillon se consacra alors à sa vocation touristique de station balnéaire malgré un déclin démographique à partir de 1968 (5377 habitants), ne comptant plus que 5000 habitants en 1990.

 

Commentaires

  • graff

    1 graff Le 28/08/2013

    Foulques Réchin n'était pas comte de Poitiers mais comte d'Anjou. En 1087 le comte de Poitiers était Guillaume IX "le troubadour".

Ajouter un commentaire

Anti-spam