Le Beugnon

Savez-vous ce qu’était la « moyenne justice » avant la Révolution ?

Il s’agissait d’une justice seigneuriale qui, au Moyen-âge,  s’était substituée à la justice royale. Jusqu’au XVIème siècle, le seigneur présidait lui-même son tribunal, lui permettant de maintenir une forte emprise sur ses terres. Puis l’institution de juges professionnels tendra à  redonner au pouvoir royal ses prérogatives.

On distinguait trois degrés de justice seigneuriale  (Wikipédia) :

  • Justice haute (ou haute justice): le seigneur (ou plus exactement le juge seigneurial) pouvait juger toutes les affaires et prononcer toutes les peines, dont la peine capitale, celle-ci ne pouvant toutefois être exécutée qu'après confirmation par des juges royaux .
  • Justice moyenne (ou moyenne justice) : le seigneur pouvait juger les rixes, injures et vols. Les délits ne pouvaient être punis de mort. Pratiquement, la moyenne justice jouait un rôle important au civil, notamment en matière de successions et de protection juridique des intérêts des mineurs : apposition de scellés, inventaire des biens des mineurs, nomination des tuteurs, etc.

    Le dictionnaire de droit et de pratique..., Paris 1759, précise :

 "En matière criminelle, le seigneur moyen justicier peut connaître des délits ou crimes légers, dont la peine ne puisse être tout au plus qu'une condamnation de 75 sols d'amende envers Justice. Si le crime commis en la terre du Moyen Justicier méritait plus grave peine, le procureur fiscal, appelé aussi procureur d'office, doit dénoncer le coupable au Haut-Justicier, pour qu'il ait à en connaître. Pour l'exercice de la Moyenne Justice, il doit avoir Siège, Juge, Procureur d'office, Greffier, Sergents, Prison au rez-de-chaussée, sûre et bien fermée. Peut le dit Moyen Justicier prendre, ou faire prendre tous délinquants qu'il trouve en sa terre, les emprisonner, informer, tenir le prisonnier l'espace de 24 heures. A l'instant des 24 heures, si le crime mérite plus grave punition que de 60 sols parisis envers Justice, il est tenu de faire conduire le prisonnier au Haut-Justicier, et y faire porter le procès, pour y être pourvu. Ainsi la connaissance des crimes dont la peine donne atteinte à l'honneur, n'appartient point au seigneur qui n'a que Moyenne et Basse Justice, mais seulement au juge du seigneur qui a la Haute Justice, auquel le vassal est obligé d'envoyer les délinquants dans les 24 heures qu'ils auront été constitués prisonniers. Le juge du Moyen Justicier peut donc informer, même décréter les prévenus de crimes qui méritent plus grave punition que de 60 sols parisis envers Justice, et faire dans les 24 heures l'instruction jusqu'à sentence définitive exclusivement, et ensuite il doit transférer les prisonniers dans les prisons du Haut-Justicier; mais après les 24 heures, il ne peut plus en prendre connaissance, ni faire aucune instruction. Si le Haut Justicier donne sentence contre un sujet du Moyen Justicier, ou autre dont il aura fait la capture, et si celui-ci le fait mener aux prisons du Moyen Justicier, le dit Moyen Justicier prendra préalablement, sur l'amende ou confiscation, 60 sols parisis, avec les frais de la capture et autres semblables. Celui qui a Moyenne Justice, peut créer et bailler tuteurs et curateurs, et pour cet effet, faire apposer scellés, faire inventaire des biens des mineurs auxquels il aura fait pourvoir de tuteurs, et non autrement. Peut le Moyen Justicier faire mesurer, arpenter et borner entre ses sujets les chemins et voies publiques, élire messiers dans la saison, auxquels il fera taxe raisonnable, et condamner ses sujets en l'amende par faute de cens non payé aux justices où l'amende est due.

Droits utiles du Moyen Justicier

Le Seigneur Moyen Justicier Justicier perçoit sa part des amendes. S'il ne possède pas de directe, il n'a aucun droit de chasse. Enfin, il peut orner sa maison des marques seigneuriales: tours, créneaux, girouettes et pont-levis, interdites à tout autre, sauf autorisation du Seigneur Haut Justicier."

Droits honorifiques du Moyen Justicier

Il a droit au respect de ses justiciables, qui lui doivent le "salut" et a toujours la préséance sur les Seigneurs Bas Justicier et Directe."

  • Justice basse (ou basse justice) : le seigneur pouvait juger les affaires relatives aux droits dus au seigneur, cens, rentes, exhibitions de contrats et héritages sur son domaine. Il s'occupe aussi des délits et amendes de faibles valeurs (dégâts des bêtes, injures, amendes inférieures à 7 sols 6 deniers). Il doit posséder sergent et prison afin d'y enfermer tout délinquant avant de le mener au haut justicier.

Quel rapport y-a-t-il entre la moyenne justice et le Beugnon à Périgny ?

On trouve dans « Châteaux, Manoirs et logis, la Charente Maritime, vol 1, éditions patrimoine et médias, 2008 », les indications suivantes :

 «  La propriété de Beugnon, (grande rue à Périgny), était une seigneurie avec le droit de moyene justice  et de fuie [c’est-à-dire le droit honorifique d'avoir un  colombier].

 Elle  appartint vers 1640 à Etienne Gorribon puis une dizaine d’années plus tard à Louis Allaire. Échu en 1718 à Charlotte Barbot,  épouse de Pierre-Claude du Pont de Gault et héritière d’Henri Allaire, elle resta aux mains de la famille Pont de Gaux jusqu’en 1769, puis  vendue à Henri Gilbert de Jouy, président trésorier de Fance au bureau des finances de la généralité de La Rochelle.

Situé au fond d’une vaste cour, ce logis rectangulaire sans prétention qui a été couvert par d’inesthétiques tuiles mécaniques, ne possède aucun détail remarquable, si ce n’est son élégante porte piétonne en plein cintre du XVIIème siècle, décorée de feuilles de laurier sculptées et accompagnée par deux pilastres cannelés qui portent un fronton triangulaire, ponctuée par deux vases. À l’origine, elle devait accompagner une porte cochère à couvrement percée dans un mur de clôture couronné par une série de merlons décoratifs symbolisant les quelques privilèges nobiliaires attachés à ce domaine depuis 1599 ».

 

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